Il y a matière à s’interroger.
Dans ma pratique quotidienne du recrutement et de la chasse de tête j’ai été confronté à un phénomène nouveau : les candidats approchés pour leur proposer une opportunité de poste comprenaient de moins en moins que je puisse leur demander de m’adresser leur CV.
Bien évidemment j’argumentais que j’en avais besoin pour avancer leur candidature.
La réponse quasi systématique était de me rétorquer que leur profil social est à jour et retrace complétement leur parcours professionnel. Donc quel intérêt ?
Cette attitude s’est accentuée au fil du temps pour devenir récurrente auprès d’une population de cadres régulièrement sollicités et/ou des jeunes générations. Souvent le candidat concerné finissait par m’envoyer un CV mais chaque fois je sentais son agacement face à une démarche dont il ne comprenait pas (plus) l’utilité.
Bien entendu, porté par l’habitude et une certitude, hélas datée, j’ai résisté à cette tendance lourde jusqu’au jour où j’ai pris le temps d’une réelle réflexion … et si ces candidats étaient dans le vrai et le bon sens ?
Cette réflexion m’a permis de mettre en évidence plusieurs constats :
Le CV est un document personnel échangé de façon confidentielle (normalement) aux seules personnes destinataires.
Le profil social professionnel est un document public.
Cette différence fondamentale comporte un certain nombre d’avantages en faveur du profil.
On lit régulièrement dans la presse des statistiques sidérantes sur le pourcentage de CV qui seraient favorablement arrangés et ceux qui seraient flatteusement mensongers.
Il tombe sous le sens que le risque est gérable et il est tentant de travestir la vérité dans un document confidentiel (même si le risque est réel). Il en est tout autrement pour la publication d’un document ouvert à tout public.
En effet, offrir à tous la lecture d’une expérience fausse, de diplômes inventés, de résultats fictifs est plus qu’hasardeux. Quid de la réaction possible de la hiérarchie, des collègues, des clients, des partenaires professionnels ?
Fort de ce constat, j’ai analysé chez Avantage Consulting le comparatif entre le contenu du CV et le profil de nombre de candidats. Le verdict est formel : le profil est très majoritairement plus fidèle à la réalité que le CV !
Autre intérêt majeur du profil – une structuration de l’information imposée qui favorise le comparatif des profils et une certaine rigueur. On est là assez éloigné du « beau CV » alambiqué et coloré très à la mode.
En ce qui me concerne c’est toujours la qualité (au sens large) de l’information qui m’intéresse.
En conclusion : J’ai radicalement changé ma façon d’appréhender la gestion des candidatures. J’ai privilégié l’exploitation des profils au détriment des CV. J’y ai gagné en temps et en efficacité. J’ai également constaté une communication plus fluide avec les candidats.
Alors, le CV est-il mort ?
Seul l’avenir nous l’apprendra.
En tout état de cause ce sera au mieux une mort lente si l’on se réfère à la pratique persistante de l’antique lettre de motivation et du poussiéreux dossier de candidature.
Nos habitudes rassurantes sont un frein majeur au changement même quand il devrait s’imposer à la réalité.
Cet article vous a intéressé, ou au contraire déplu ? Vous approuvez ou vous êtes en désaccord ? Vous pensez avoir appris ou vous trouvez le sujet complétement bateau ? Vous avez envie d’y réagir ? Vous restez sur votre faim et aimeriez développer ? Je suis pleinement ouvert à la critique (au sens réel du terme). Alors n’hésitez pas à le faire savoir …
Pierre TRIAU